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Bura, buri

Samedi 4 avril 2020. Réveil 5h00, notre copain l’oiseau au cri indéfinissable nous souhaite une bonne journée au paradis !

Brigitte part pour sa grande balade du matin. Elle fait la halte déjà rituelle chez le professeur et sa sœur à Jerma. Ici les habitudes sont vite prises et il n’est déjà plus question de passer devant la maison d’une personne que l’on connaît sans prendre le temps de s’arrêter pour discuter un instant, partager une sulpa, boire ou manger un petit quelque chose.

Avec la sœur de Didi

Aujourd’hui, Karma Bir Pun (le professeur) et sa sœur Dila Pun l’emmènent manger des rotis chez leur voisine qui se révèle être la sœur aînée de Didi Sandra. Elle et son mari sont entourés de la joyeuse équipe de leurs petits-enfants qui sont tout excités par la présence de Brigitte. Ils rient de bon cœur et lui posent un tas de questions que son népalais minimaliste ne lui permet pas de comprendre.

Brigitte se demande pourquoi ils parlent fréquemment de « Bouddha » alors qu’ils sont hindouistes. Peu à peu, son oreille s’habituera et saisira la nuance. Ce n’est pas « Bouddha » mais « bura » qui est prononcé. Nous sommes surpris de ne pas trouver ce vocabulaire basique dans notre petit dictionnaire de poche. Nous ne sommes guère plus avancés.

Une institutrice hors norme

Les leçons de Dazu

Un beau jour, alors que Man sera parti explorer le versant vierge du Sisne, Dazu décidera de prendre les choses en main et de nous apprendre des rudiments de népalais. Sa méthode « Assimil », qui contrairement à celle de Man n’est ni scolaire, ni orientée sur l’écrit et le déchiffrage des caractères devanagari, se révélera très efficace.

Didi et Dazu nous offriront chaque jour quelques mots de vocabulaire qui nous permettront de communiquer dans un franco-anglo-nepali peu orthodoxe ponctué de mimes qui amusera tout le monde.

Lors de notre première leçon, Dazu nous expliquera que, dans un couple, « bura » est le mari et « buri » la femme. Enfin notre réponse ! Notre nouvel instituteur nous apprendra qu’il est aussi possible de dire « logne » / « svasni » ou de façon plus officielle « shriman » / « shrimati ».

A partir de ce jour-là, Didi emploiera systématiquement l’expression « bura buri » pour nous présenter un couple marié ou parler de nous.

Un patchwork linguistique

A notre retour en France, pour parfaire notre nepali naissant, nous chercherons à retrouver l’origine des expressions apprises aux côtés de Didi et de Dazu. Aucune trace de « bura / buri » en nepali. Dazu emploie un vocabulaire marqué par les deux décennies vécues en Inde. Il utilise souvent des mots issus de l’hindi qui partage de nombreux points communs avec la langue du Népal. Nous tournons donc nos recherches vers cette langue dont les dictionnaires sont plus épais, même sur internet. Bingo ! Un dictionnaire « hindi-anglais » nous traduit « bura » comme le mal, la méchanceté. Nous allons arrêter ces passionnantes recherches étymologiques car, n’en déplaise à Brigitte, la forme féminine à exactement la même signification !

Avec sa multitude d’ethnies de diverses origines et plus d’une centaine de langues utilisées couramment au Népal, les influences sur la langue officielle nationale sont nombreuses. Pour couronner le tout, le Rukum se situe à la limite des zones d’influence des langues sino-tibétaines et indo-iraniennes. Il est fort probable que les mots que nous apprenons sont un savant mélange de nepali et d’autres dialectes. Peu importe car l’essentiel est d’arriver à communiquer avec les habitants de Banphikot !

Récolte des lentilles

Redescendue à Lochabang, Brigitte montre les photos de sa sœur à Didi qui est contente de la revoir ! Avec tout le travail qu’elles ont, il est extrêmement rare qu’elles aient des occasions de se retrouver même si elles habitent tout près l’une de l’autre.

Didi, Jessica et Aunty, la tante adorable, très âgée, toujours souriante bien que très malade, sont dans un champ au-dessus de la maison des buffalos. Elles cueillent le dal sauvage là où le blé a été coupé par Dazu.

Récolte du dal en famille

Les plants de lentilles rampent sur le sol avec leurs petites gousses. Il y en a deux types. Celui aux gousses les plus grosses est délicieux à manger même cru. Ses graines ont un bon goût de noisettes. Prem nous en a déjà offert lorsque nous sommes allés ensemble au moulin. La récolte de ce dal sera ficelée en petits bouquets qui seront suspendus au soleil. Dans quelques semaines, il faudra les écosser. L’autre type de dal présente de toutes petites gousses impossibles à ouvrir. Il est donné aux animaux.

Brigitte se joint spontanément à elles et, pendant trois heures, toutes quatre travaillent en conversant joyeusement. Le rire ponctue souvent les discussions ! Soudain, Jessica s’exclame « kana kane ». Elle a faim cette petite ! Didi met immédiatement fin au travail et prend la tête de sa petite troupe de femmes pour descendre préparer le repas. Sans perdre une minute, elle prépare la pâte pour fabriquer les galettes de maïs.

Didi veut que Brigitte partage leur repas mais il est grand temps pour elle de remonter à Horlabot car Laurent doit commencer à s’inquiéter sérieusement de cette absence prolongée. Effectivement, il se demande si elle n’a pas été interceptée par la police ?

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