Accueil > Népal > Confinés mais libres > Dudhila

Dudhila

Mercredi 13 mai 2020. Réveil 4h00 au paradis d’un fantôme très aimable et souriant qui réveille Brigitte en sursaut en criant « hello! ». Elle n’a pas eu le temps de voir son visage, juste son sourire solaire. Elle se demande encore qui pouvait bien être cette personne si chaleureuse venue la saluer furtivement depuis l’au-delà et qui ne reviendra plus jamais durant tout le séjour au Rukum. Man lui a dit avoir peur des fantômes, il n’a jamais dû en croiser un aussi lumineux et bienveillant que celui qui a fait une apparition furtive à Horlabot ce matin.

L’oiseau du paradis dort encore. Aujourd’hui, après l’écriture du carnet de confinement, nous prenons une douche et nettoyons avec grande précaution nos vêtements élimés et grillés par le soleil.

Les hauts de Kanda

Nous partons ensuite à Banphikot récupérer et envoyer nos messages. Brigitte abandonne Laurent et monte par la ridge à Kanda. Aujourd’hui, elle a prévu l’exploration du Haut Kanda puis une grande traversée vers Likhabang.

Epicerie ambulante à Neta Bazar

Arrivée aux petits temples de Kanda situés à côté de la mare, elle s’aventure en terres inconnues, expliquant aux habitants qu’elle croise, quand cela lui semble nécessaire, qu’elle est en confinement depuis deux mois chez Man Bahadur KC.

En haut du village, il y a une bifurcation. Comme elle veut explorer la traversée vers Likhabang, elle prend le chemin de gauche et arrive à un magnifique replat sur lequel se trouve une belle maison en ocre entourée d’une mer dorée d’épis de blé ondulant sous une brise légère : contemplation admirative et gratitude au ciel pour tant de beauté.

Proposition inattendue

Elle continue en traversée montante sur la gauche, passe devant quelques maisons et veux continuer vers un petit éperon rocheux qu’elle a repéré plus loin mais un jeune couple sort d’une des maisons, la rattrape et la femme lui dit que son mari va m’emmener à Dudhila.

Une mer de blé

Brigitte se demande ce que peut bien être Dudhila. La curiosité et l’intuition permanente qu’aucune opportunité de la vie ne doit être perdue, l’incitent à suivre ce jeune homme et faire demi-tour pour monter dans la direction opposée de celle qu’elle avait prévue.

Le jeune homme s’appelle Yubahal Dahal ; il lui dit rêver de la France où la vie est « beaucoup plus belle ». Brigitte tente de lui expliquer que la France n’est pas le paradis qu’il imagine mais il lui répète que son rêve est d’y vivre ! Il a travaillé pendant deux ans pour un opérateur de téléphonie mobile à l’aéroport de Doha. Pendant quelques mois la vie a été très difficile pour lui au Qatar car il ne parlait pas anglais.

Yubahal dit avoir besoin d’argent liquide en complément de ses récoltes. Brigitte lui parle du projet de Man de circuits en «  home stay ». Il est très intéressé et lui donne son numéro de téléphone pour que Man puisse le contacter.

Le temple de Dudhila

Tout en parlant, tous deux montent assez rapidement et atteignent un endroit plat avec un temple qui domine le lac Syarpu. La vue et le site valaient vraiment le détour ! Quelle belle et inattendue découverte.

Le temple de Dudhila

Cet endroit de pèlerinage a été réhabilité récemment par le gouvernement comme en atteste une pancarte. Selon Yubahal, au mois de novembre, Dudhila est noir de monde et il n’y a plus un centimètre carré de libre ici tellement les pèlerins venus de tous les villages alentours sont nombreux. Immédiatement, Brigitte envisage d’assister un jour à ce pèlerinage.

Les kafals

Elle lui offre une cigarette, il lui prépare une sulpa avec du bhang. Soudain, Yubahal appelle des enfants, dont Brigitte n’avait pas soupçonné la présence. Ils sont perchés en haut d’un arbre très haut dont ils descendent avec une agilité et une vitesse incroyables pour lui offrir des « copple » ou encore kafal, des petits fruits rouges consistant essentiellement en un gros noyau. Elle les mange en crachant consciencieusement les noyaux alors qu’il convient de les avaler car ils « nettoient » les intestins !

Sulpa à Dudhila

Ici, les cueillettes sont toujours synonymes de gaieté comme pour remercier la nature des trésors qu’elle offre continuellement aux êtres vivants qui la respectent. Les différentes variétés de baies sauvages arrivent à maturité les unes après les autres. Cette succession naturelle est une véritable leçon de vie. Ce calendrier de la vie sauvage permet de ne rien gâcher et de vivre au rythme des saisons.

Suivre ses intuitions

Après le havre de paix de Dudhila qui lui deviendra un lieu très familier, Brigitte vient donc de faire une deuxième découverte, les kafals qui vont agrémenter notre régime alimentaire pendant plusieurs semaines. Elle remercie son « intuition » de l’avoir incitée à renoncer à la traversée sur Likhabang. Il lui semble que ses décisions instinctives lui sont soufflées par un esprit bienveillant qui se balade au dessus d’elle pour l’orienter vers les cadeaux de la vie ou à faire face aux difficultés.

Yubahal Dahal et les enfants la quittent en lui indiquant un chemin de retour qui descend directement à Kanda en dominant le lac Syarpu.

De retour à Banphikot, elle retrouve Laurent qui attend depuis deux heures car internet ne fonctionne pas. La bahini du shop a préparé un grand seau de riz soufflé et de nouilles lyophilisées. Tout comme les employés de l’hôpital et de la municipalité, nous en achetons un cornet et nous installons sur le banc avec eux pour le déguster.

Man joue les prolongations

A Lochabang, Dazu a récolté l’ail et pioché tout le jardin en étalant le fumier récupéré hier. Man devait rentrer ce soir mais Didi nous apprend qu’il vient de l’appeler pour la prévenir qu’il reste encore une nuit à Jamelkot. Nous n’arrivons pas à localiser ce village sur la carte. Ce contre-temps ne soulève plus en nous la moindre inquiétude. Comment ne pas être sereins entourés de Didi et Dazu ?

Didi nous prépare un délicieux dal bhat avec un tarkari au beurre clarifié. Nous arrivons maintenant à bien discuter avec Didi, Dazu et Jessica en utilisant nos quelques mots de népalais et les mains.

Didi voudrait que nous dormions dans la chambre de Man mais Horlabot et l’oiseau du paradis nous attendent. Nous avons rendez-vous demain en début d’après-midi pour étaler le compost posé en pâté sur les champs et les guérir ainsi de la varicelle noire.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *