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Inéluctable verdict

Premier cours nepali

Dimanche 29 mars 2020. Brigitte se réveille à cinq heures dans un silence merveilleux ponctué des cris de son nouvel ami l’oiseau du paradis. Elle part pour une grande balade vers le haut de la colline en évitant encore les maisons pour ne pas effrayer les habitants.

Cependant elle rencontre sur son chemin trois jeunes filles qui coupent de l’herbe. Au début, elles sont très craintives mais grâce à son Népalais très minimaliste, Brigitte réussit à expliquer notre situation. Elles comprennent que nous connaissons Man Bahadur KC et deviennent très amicales. Elles essaient d’en savoir plus sur nous malgré la barrière de la langue.

Premier cours de nepali

Retour au camp, Man veut nous apprendre le nepali. Il a amené des livres d’école de Jessica pensant que nous devons savoir lire le népalais pour pouvoir le parler. Sa première leçon consiste à apprendre les cinq premières des trente-six consonnes. Nous avons beaucoup de mal à les prononcer et nos oreilles ne perçoivent pas les différences minimes. Néanmoins, nous essayons studieusement de recopier et répétons nos gammes de « Ka, Kha, Ga, Gha, Na ». Il nous fixe un objectif de cinq lettres par jour. Dans une semaine, ce sera réglé. Nous trouvons notre instituteur très optimiste !

Après cette joyeuse leçon, nous passons à des choses plus graves. Man nous apporte les nouvelles du matin. Il a entendu dire qu’il y avait eu 800 morts en Italie sur une seule journée et qu’aux Etats-Unis le décompte macabre atteint déjà 30’000 décès pour 600’000 cas. Rumeurs ou réalité tragique ? Impossible à dire. Il est en revanche certain que la situation à Katmandou devient catastrophique. Avec le lockdown, la nourriture et en particulier les légumes viennent à manquer. La Chine a envoyé de l’aide médicale. La France et l’Allemagne rapatrient leurs ressortissants. La police a les pleins pouvoirs dans le district du Rukum. Il y aurait déjà eu deux cents arrestations pour non respect du confinement.

Fin du trek

Nous devons nous rendre à l’évidence : nous ne poursuivrons pas notre trek. Maintenant, c’est une certitude. Il faut l’annoncer à l’équipe. Le trek est suspendu jusqu’à nouvel ordre. Nous convenons avec Man que nos compagnons du Rukum doivent rentrer chez eux auprès de leurs familles. Les autres n’ont pas le choix :ils ne peuvent pas rentrer sur Katmandou. Les parents de Man leur proposent de continuer à les héberger gracieusement aussi longtemps qu’ils le souhaitent. De notre côté, nous offrons naïvement de leur payer un demi-salaire à titre de compensation, pour être éloignés de chez eux, et de continuer à payer leur nourriture.

Bhim semble d’accord et compréhensif. Il va transmettre l’information à ses trois amis. Par l’intermédiaire de Bhim, Namgyal nous fait passer un message de Renée qui confirme l’aggravation de la situation sanitaire en France. Les sources de Man étaient bien informées.

Nous partons explorer les hauteurs de Horlabot mais cette fois-ci en direction de Chinkhet. Avant d’arriver aux premières maisons, nous faisons demi-tour pour ne pas attirer l’attention.

Shopping à Cherakhet

Après le déjeuner, nous allons au moulin pour moudre le maïs que nous avons acheté à Didi Sandra. Modan et Dorje restent au moulin tandis que nous remontons la vallée jusqu’à Cherakhet en compagnie de Man et de Bhim pour tenter de trouver une boutique ouverte en dépit du lockdown et y faire quelques courses indispensables. Les informations obtenues par Man s’avèrent encore une fois exactes.Clandestine ou non, une boutique est bien ouverte. Elle est plutôt bien achalandée. Malgré sa taille minuscule, on y trouve un peu de tout. La pénurie alimentaire qui règne à Katmandou n’est pas parvenue jusqu’ici.

Shopping à Cherakhet

Nous repartons avec de l’huile, du sel et du sucre. Les compléments indispensables aux aliments de base que Didi peut nous procurer. Nous ne comprenons pas pourquoi Bhim refuse de faire des stocks plus importants alors que nul ne sait ce qui nous attend demain.

Refus de l’évidence

De retour à Horlabot, il règne une ambiance étrange. Contrairement à son habitude, Dibi ne nous adresse pas la parole et semble nous ignorer. Il reste à l’écart.

Avant la tombée de la nuit, Man remonte à Horlabot. Il veut rencontrer l’équipe pour comprendre leur position. Cette réunion tourne vite à la confrontation. Ils veulent rentrer au plus vite sur Katmandou. Nous avons beau leur rappeler que ceci est impossible et que nous ne sommes pas responsables de la situation, ils déchargent leur désespoir sur Man. Que peut-il bien faire contre une décision prise par le gouvernement ?

Man clôt la réunion. Espérons que la nuit portera conseil.

Dibi part chercher du chang avec un bidon dans le quartier Magar de Lochabang en nous disant qu’il descend chercher de l’eau… Nous ne sommes pas dupes. Pourquoi nous cacher la vérité alors que ni Man ni nous n’avons la moindre intention de leur interdire quoi que ce soit et surtout pas de consommer de l’alcool si cela peut apaiser leurs angoisses face à ce lockdown inédit et les rendre de bonne humeur ?

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