Samedi 7 mars 2020. Ce matin, nous nous laissons le temps de récupérer et d’envoyer des messages pour raconter l’incroyable expérience que nous venons de vivre. L’épidémie de coronavirus prend de l’ampleur en Europe. La France semble connaître la même évolution que l’Italie avec un retard de deux semaines. Inquiétant.
Nous passons la journée à déambuler dans les rues de Katmandou avant de rentrer à l’hôtel enfiler une nouvelle tenue de soirée car nous sommes attendus dès dix-huit heures pour prendre part à la réception des voisins et des amis de la famille.
Nous regagnons les lieux quittés tôt ce matin. L’ambiance est très détendue. On retrouve avec plaisir de nombreux guides et cooks de l’agence Khumbila qui, pour une fois, ne travaillent pas. Ils sont invités.
Zimba nous présente Chiti, un nouveau collaborateur. Il parle très bien français. Nous discutons longuement avec lui de l’évolution du business du trek. Il espère que les plateformes qui se mettent en place permettront aux clients de contacter directement les agences locales. Nous partageons sa vision mais lui exposons nos doutes. Comment faire changer les mentalités ? Comment s’y retrouver dans cette multitude d’agences qui proposent les mêmes services ? En fait, ces plateformes occidentales ne proposent-elles pas une simple uberisation de ce marché ? Moins d’humain pour faire des économies. Est-ce ce que nous souhaitons ?
Il voudrait poursuivre la discussion mais nous nous esquivons pour aller retrouver Navaraj, Bhim et les autres. Zimba revient vers nous en compagnie d’un jeune homme que nous ne reconnaissons pas. Il faut dire qu’il a bien changé depuis dix ans. Le protégé de Jean-Pierre Frachon a fait des études en France et vient de se lancer dans une aventure industrielle avec Zimba : commercialiser de l’eau de source. Encore un nouveau projet pour notre ami ! La source est située du côté de Budhanilkantha. Nous nous promettons mutuellement d’aller visiter l’usine fin avril, au retour de notre trek.
Namgyal s’éclipse pour une partie de poker avec quelques amis qu’il a invités. La quarantaine de Tinley et de Pema est terminée. Ils font du vélo au milieu des invités. En les esquivant, nous croisons le chemin d’une sherpani qui travaille à l’Ambassade de France. Décidément, tout le monde parle français ! Nous connaissons la moitié des invités. Mais aujourd’hui, nous serons sherpas. Nous sommes invités à rejoindre la grande table des oncles et des tantes qui eux ne connaissent personne d’autres ce soir. Amusant !
Une fin de soirée en musique
Tsering a invité des amis musiciens et chanteurs qui vont se relayer tard dans la nuit pour animer la soirée. Il y a même une star locale qui exerce son métier à New-York. C’est un saxophoniste remarquable. Transportée par les sons qu’il est capable de générer, Brigitte demande un morceau supplémentaire puis un autre. Après les « professionnels », les enfants de « Jibi » entrent en scène. Jibi est un petit homme très émacié, ancien guide de l’agence de Zimba, son visage n’est qu’un immense sourire. Ses enfants sont maintenant de jeunes adultes. Sa fille chante accompagnée par son frère à la guitare. Ils sont beaux et réellement doués. Jibi est très fier d’eux et ravi de notre admiration à leur égard. Il semble profondément ému. Vient le tour de Danu qui chante en s’accompagnant à la guitare puis celui d’Ang Dati qui improvise des paroles sur des airs de rock qui lui sont inconnus accompagnée par Tsering et ses amis.
Ang Dati nous dira « je ne connais pas ces chansons mais elles sont belles ». Elle a retrouvé toute sa joie de vivre, comme libérée de la pression du mariage. Rapidement, il fait beaucoup plus frais qu’hier mais l’ambiance est tellement chaleureuse que personne n’a envie de partir. La piste de danse ne désemplit pas.
Tsering finit par se laisser convaincre de chanter. Pour lui, chanter devant ses parents est une grande première. Ang Dati est émue aux larmes. Zimba, surpris par la qualité de la prestation de son fils, filme avec entrain. Ils sont très fiers de leur fils qui vient de dévoiler un aspect secret de sa vie : celui qu’il partage la nuit avec ses amis musiciens.
Nous partons dans les derniers pour rentrer à l’hôtel en compagnie de Danu et Nima. Nous ne saurons jamais à quelle heure Namgyal terminera sa partie de poker.