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Semis du maïs

Vendredi 15 mai 2020. Réveil 5h00 au paradis de l’oiseau qui crie « il fait grand beau ! ».

Deux heures plus tard, nous sommes à Lochabang pour finir d’étaler le fumier « à la fraîche » afin que le maïs puisse être semé sur tout le champ. Ganesh, le jeune frère du mari de Bina a commencé le labourage du champ, là où nous avons déjà étalé le fumier. Derrière lui, dans le sillon laissé par la charrue, Santosh, le fils de Bina pose les graines de maïs à vingt centimètres les unes des autres pendant que Didi sème à la volée des légumineuses. Ici, l’association des cultures est une pratique ordinaire !

Épandage express

Un petit garçon de Sandanbura est venu nous aider à étaler les derniers tas de compost car il faut faire vite pour ne pas retarder la progression des bœufs. Sa technique est amusante. Penché au-dessus du tas, il gratte de ses deux mains et projette le fumier et la paille à l’arrière entre ses jambes. Pour lui c’est un jeu ; il est moins regardant que nous sur la répartition du fumier. Laurent fait équipe avec l’enfant en essayant de combler les manques laissés par cette jeune et vigoureuse machine à épandre. Brigitte attaque de l’autre côté du champ.

Les bœufs se rapprochent. Nous travaillons dur mais nous n’avons plus que quelques rangs d’avance avant le passage de la charrue. Heureusement, nous sommes déjà à la hauteur de la maison des buffalos. Vers 9h, juste avant l’arrivée de l’attelage des bœufs, nous avons terminé.

Repas des travailleurs

Après ces deux heures de travail intensif, Laurent descend déguster les rotis en donnant généreusement quartier libre à Brigitte qui part aussitôt explorer la crête qui monte à Phera entre Chinkhet et Garaghat, celle que le mauvais temps l’avait empêchée de parcourir trois jours auparavant.

Laurent mange avec les travailleurs, Didi et Dazu. La jolie tante de Man, que nous surnommons « abdos » tellement elle a un beau petit ventre musclé bien visible entre le haut de sa longue jupe et le bas de son très court tee shirt qui lui couvre juste la poitrine, les rejoint pour fumer la sulpa du matin. Sa sœur qui partage son mari est aussi jolie qu’elle, également très fine et aux muscles sculptés. Toutes deux quoique très menues sont incroyablement fortes !

Didi Sandra qui porte le même type de vêtement est également très belle. Parfois, elle soulève sa jupe en riant pour monter à la maison des buffalos dévoilant des jambes d’une beauté inouïe.

Sulpa matinale

Remerciements touchants

Les tantes nous ont remerciés pour notre aide. Leur mari, Ardu, semble épaté de notre implication dans les travaux agricoles. Ils sont vraiment adorables.

Après le repas, sans rien dire, Laurent montera faire le même travail sur le champ du dessus qui est plus petit. Il épand le fumier méthodiquement. Cuit sous le soleil, il persévère car il veut achever le travail commencé. Lorsqu’il a terminé, assoiffé et fourbu, il redescend se laver et se désaltérer à la fontaine. Dazu qui vient de finir de semer le maïs dans le champ du bas est surpris de revoir Laurent et ravi d’apprendre que celui du haut est prêt.

Épuisé par la chaleur, Laurent remonte à Horlabot pour se reposer. Loin de le rafraîchir, la brise est comme une soufflerie d’air brûlant.

Le temps de l’exploration

Aujourd’hui, le temps est splendide et propice à l’exploration. Après le départ de la piste déjà repérée, Brigitte franchit un deuxième gué et, comme espéré, découvre un petit chemin très raide qui monte sur la crête séparée de l’arête des ocres de Jhula par le torrent qu’elle vient de franchir.

Un peu plus haut, ce sentier rejoint un chemin en traversée qui part à droite vers le torrent franchi au deuxième gué et remonte le long de ce dernier. Après un petit repérage le long du torrent, Brigitte repart à gauche dans ce qui lui semble être la direction de son objectif du jour.

Le chemin monte très agréablement sur la croupe jusqu’à une première bifurcation. Le relief est très escarpé. Au loin, une crête plus haute ferme l’horizon.

Vue plongeante sur la Sani Bheri

En bonne compagnie

Tentée de découvrir ce qui se cache derrière, Brigitte entreprend une longue traversée vers cette crête jusqu’à ce qu’elle croise un type plutôt bizarre qui fait demi-tour pour la suivre. Il n’a pas l’air bien méchant mais, comme il semble beaucoup plus costaud qu’elle, elle fait demi-tour pour rejoindre la crête initialement prévue où il lui semble apercevoir des gens.

Le type fait également demi-tour pour continuer à la suivre mais un couple arrive du haut, le double et rattrape Brigitte qui, bien que peu effrayée par cet homme, qui semble un peu simple d’esprit, s’avoue soulagée d’être maintenant en bonne compagnie!

Elle explique la situation au couple très sympathique. L’homme lui dit de faire attention, de ne pas se promener seule et propose d’appeler la police pour signaler le type louche. Elle décline la proposition.

Le couple habite à Garabang. La femme, tout aussi gentille que son mari, est plus réservée. L’homme dit : « ma femme est formidable mais elle est devenue trop grosse ! » . Cette déclaration inattendue faite devant l’intéressée qui rit rend Brigitte mal à l’aise. Elle lui répond : « votre femme est très belle ». Plus tard, Brigitte réalisera qu’ici, chacun dit ce qu’il pense sans filtre et sans diplomatie. C’est ainsi.

Trop loin !

Brigitte leur explique qu’elle voudrait aller à Phera puis à Thuma Lekh. Ils rétorquent qu’il faut cinq heures à partir d’ici pour se rendre là-haut en passant par Garabang. Attention, les Népalais sont rapides !

Garabang se trouve de l’autre côté de l’arête que Brigitte convoitait. L’homme lui dit que c’est un joli village avec un petit centre de santé et une école. Il conviendrait d’y faire étape avant de se rendre à Thuma Lekh. La femme précise qu’à Garabang, comme dans tous les villages des environs, elle pourra dormir et manger et que ce sera gratuit naturellement.

Brigitte et le couple cheminent ensemble pour rejoindre la première crête avec son magnifique point de vue sur Jhula, son arête d’ocre, son col et tout l’horizon lointain. Avant de la quitter pour descendre vers la rivière en direction de Jhula, l’homme et la femme lui précisent qu’ils seront de retour chez eux ce soir après un rapide aller-retour à Jhula et lui proposent de l’héberger.

Brigitte décline cette gentille proposition car elle est attendue à Horlabot. Elle poursuit sur l’arête. Le chemin est très bien marqué ; il semble assez emprunté.

Jhula au loin

Cartographie artisanale

Au cours de ses « explorations », Brigitte essaie de noter toutes les altitudes des points caractéristiques comme les croisements de chemins, les sources, les traversées de vallée… Cependant, sans fonds de carte pour afficher tout cela, ses topos faits à sa petite échelle humaine se révèlent parfois bien approximatifs à plus grande échelle. L’orientation relative de certaines pistes où arêtes se révèle parfois complètement fausse.

En fait, tout se complique lorsqu’elle essaie de connecter deux itinéraires repérés séparément. Elle est consciente que la cartographie des chemins sans moyen d’évaluation des distances et des orientations est très problématique mais la description des itinéraires au jour le jour reste faisable!

Une montagne vivante

Brigitte arrive à une source qu’elle dégage et aménage pour boire car elle n’a pas pris d’eau et il fait très chaud. Lorsqu’elle repassera ici, elle constatera que les gens utilisent maintenant « son » point d’eau et ce sera une petite fierté !

Elle arrive à un premier village, dont elle ne connaîtra jamais le nom, qui est construit sur l’arête. Il est ravissant. Devant une des maisons, le propriétaire a installé deux haut-parleurs qui diffusent Radio Sani Bheri sur tous les environs.

Elle continue la montée jusqu’à une piste en dessous de laquelle se trouvent deux maisons. Dans la cour de la dernière, les gens fabriquent des poutres à partir de troncs d’arbres tirés de la forêt. Ici, la scierie fonctionne à l’ancienne, à la force des bras.

Scierie au milieu du chemin

Pistes et glissements de terrain

A gauche, la piste se termine en cul de sac sur des rochers. Elle sera prolongée pendant la mousson en taillant la roche jour et nuit au marteau piqueur-pelleteuse provoquant des vibrations de tremblement de terre pour le village et ces deux maisons accompagnées d’un vacarme insupportable audible jusqu’à Horlabot.

Brigitte repart à droite vers un deuxième village au milieu duquel passe la piste en construction. Il faut monter pour arriver en haut de l’arête. Elle tente sa chance en prenant un chemin qui semble partir dans la bonne direction.

Au début, le sentier est parfait mais soudain apparaît un gros glissement de terrain qui l’a emporté. La traversée de ce glissement de terrain datant probablement de la précédente mousson est dangereuse car le terrain est très raide et très instable. Brigitte s’en sort plus ou moins bien et voit au loin un jeune qu’elle interpelle. Il lui indique comment récupérer un chemin plus praticable. Elle réussit à rejoindre Phera et n’est pas peu fière de son exploration. Elle y demande l’autorisation de prendre de l’eau au tuyau qui dessert une maison.

Délicieuse Manisha

Immédiatement, la didi et sa fille disent à Brigitte de s’asseoir. Elle vient de faire la connaissance de Manisha, de sa fille Sita et de son fils dont elle ne connaîtra jamais le nom car Manisha le nommera toujours « fils » et Sita « frère » comme il est d’usage. Peu importent les prénoms, Manisha et ses enfants deviendront et sont déjà ses GRANDS amis. Plus tard, elle rencontrera Bhim, le mari de Manisha, tout aussi sympathique.

Manisha et Sita

Sita prépare des rotis qu’elle lui sert avec un tarkari. Brigitte est aux anges. Quel accueil, quelle ouverture aux autres ! C’est chez Manisha qu’il faut faire du « home stay » !

Les rotis de Manisha

Le temps passe. Brigitte doit hélas repartir après avoir bien discuté en népali avec Manisha et ses enfants d’un tas de sujets et bien ri. Il lui semble les connaître depuis toujours !

Avec Manisha

Dal bhat TV à Lochabang

Elle repart par la piste. Tous les gens qu’elle rencontre l’interrogent et son népali les fait bien rire. Arrivée à la première échoppe du col de Jhula, cinq didis lui offrent de l’eau et discutent joyeusement avec elle.

Après une sieste réparatrice, Laurent est redescendu à Lochabang. En passant, il constate que « son » champ est déjà labouré et semé. Didi a étalé du blé au soleil pour le faire sécher car demain elle ira le moudre au moulin. Avec Dazu, à l’ombre de la maison, elle trie le café local. Ils ne s’accordent jamais une minute de répit même après une duré journée.

Brigitte arrive de Phera et raconte sa journée. Elle a souffert de la chaleur. C’est tout dire. Dans ces conditions extrêmes, il lui était impossible d’aller à Thuma Lekh.

Didi, Dazu et Jessica nous convient à un repas TV. Nous partageons leur dal bhat en regardant le fameux feuilleton religieux.

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