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Les savons maoïstes

Mardi 31 mars 2020. Réveil 5h00 au paradis de l’oiseau qui crie. Quel bonheur d’entamer une grande journée de découverte à la fois des gens qui nous entourent et des villages et « collines » qui constituent notre nouvel univers.

Man qui est resté dormir à Horlabot nous annonce qu’il va aller avec Bhim à Musikot pour tenter de trouver un véhicule qui accepterait d’emmener l’équipe à Katmandou. Avant de partir, Man nous dit « vous devez coloniser les environs petit à petit ». Dans sa bouche le mot « coloniser » signifie non pas s’approprier mais se faire admettre par les habitants.

Sur les chemins de Dang

Une heure après le départ de Bhim et de Man, alors que nous montons en direction de la colline de pins et sommes très surpris de les apercevoir assis devant la maison familiale de Lochabang. Ils semblent avoir abandonné l’idée de se rendre à Musikot. Sans chercher à comprendre les raisons de ce retournement de situation, nous continuons à grimper.

Un homme qui fait paître ses deux vaches essaye de nous parler. Nous nous asseyons à ses côtés quelques minutes. Quel dommage que nous ne puissions nous exprimer dans sa langue !

Nous le quittons et partons en traversée en direction du village de Dang. Au passage, nous surprenons une jeune fille et sa petite sœur qui se lavent dans une fontaine au bord du chemin. Nous nous sentons plus gênés qu’elles pour qui se laver en public semble très naturel.

Une maison de Dang aux couleurs moins traditionnelles

Le christianisme au Népal

Arrivés à Dang, nous prenons le sentier qui plonge à travers les habitations pour retrouver la piste qui mène de Chinkhet au col de Naduwa. Dans la cour d’une des maisons que nous traversons, nous croisons une femme qui porte une croix autour du cou et découvrons avec surprise que le christianisme est arrivé jusqu’au Rukum.

Nos lectures nous apprendrons quelques mois plus tard que la religion chrétienne se diffusa à l’est du Rukum dans les années 70 avec l’arrivée à Taka Sera de David E. Watters, un linguiste américain qui commença à traduire le Nouveau Testament dans la langue Kham Magar. A cette époque, les lois de la monarchie hindoue faisait de la conversion religieuse un crime. Ceci n’empêcha pas de nombreux habitants de se tourner vers le christianisme.

De nos jours, le Népal, qui officiellement est un état laïc, autorise la conversion à titre individuel. Toutefois, la nouvelle Constitution condamne le prosélytisme religieux et les partis conservateurs n’ont pas abandonné l’idée de faire du Népal une République hindoue.

L’autorité paternelle

Au lieu de suivre la piste directement jusqu’à Lochabang, nous décidons de descendre jusqu’à la rivière afin de voir si le moulin de Bina a été réparé. Le moulin est désert car il est encore en panne. Nous remontons ensuite chez les parents de Man à qui nous relatons par gestes la grande extension de « notre territoire ». Ceci est bien insignifiant pour eux mais ils sont sincèrement heureux pour nous. Didi nous fait comprendre que Man ne s’est pas rendu à Musikot. Son père lui a interdit de tenter l’aventure avec Bhim : ils se seraient faits arrêter par la police.

Effectivement, Man arrive avec Bhim. Ils reviennent de la boutique de Cherakhet.

La cousine de Man est venue nous voir après son travail de contrôle « sanitaire » à Garaghat. Elle nous prépare des rotis de maïs. Un vrai régal. Bhim s’isole pour manger. Il fait la tête, certainement très déçu de n’avoir pu trouver une jeep. Il craint la réaction de ses compagnons qui l’attendent en espérant pouvoir partir dès demain.

Distribution de savons par Arka Pun

Distribution de savons

Arka Pun arrive à son tour et, comme d’habitude, il se chipote avec Man à propos des pistes trop nombreuses selon ce dernier. Cependant aujourd’hui l’heure n’est pas à la « chamaille », Arka Pun est en mission : il doit distribuer deux savons à tous les habitants de sa circonscription. Notre petit camp de réfugiés reçoit aussi sa dotation sanitaire. Arka Pun note sur son cahier « 12 soaps for trekkers group ».

Man lui rappelle que le jour de notre arrivée, après avoir bu un peu trop de raksi, il avait voulu nous dénoncer à la police ! Nous rions bien et faisons une photo tous ensemble pour immortaliser le don de savons par la municipalité rurale maoïste de Banphikot.

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